"Rien n'interdit de stocker des formules dans la mémoire permanente d'une calculatrice le jour des épreuves". Ainsi parlait Michel RICHARD, Chef de Produits grand public chez Texas Instruments France, dans le magazine
l'Ordinateur de poche n°19 de décembre 1983 en pages 13 et 14. Selon nous, aucun texte ultérieur jusqu'à ce jour n'est venu modifier cette situation.
Et pourtant pour cette session 2015, même si ils restent des cas isolés minoritaires à ce jour, il y a eu par rapport à 2014 une inquiétante
"explosion" des centres d'examens du BAC se permettant de :
- demander aux candidats ce qu'ils ont dans leur calculatrice
- leur demander d'arrêter de regarder leur calculatrice
- fouiller leur calculatrice
- confisquer leur calculatrice
- remplir des procès verbaux de suspicion de fraude
Même si une grande partie des incidents qui nous ont été rapportés concernent des calculatrices haut de gamme couleur assez voyantes comme la TI-Nspire CX CAS, personne ne semble être véritablement à l'abri,
l'une des victimes au moins étant équipée d'une simple TI-83 Plus.
Une partie de la communauté éducative râlait auprès de sa hiérarchie depuis des années contre la possibilité d'utiliser les mémoires des calculatrices comme "anti-sèches". En réponse, l'Institution a sorti cette année un texte imposant l'utilisation d'un mode examen à compter de la session 2018, mode examen qui selon nous ne résout rien et amène de nouveaux problèmes possiblement plus embêtants - mais ce n'est pas le sujet aujourd'hui.
Galvanisés par ce texte, plusieurs de ces personnes semblent avoir décidé de ne rien laisser passer cette année, afin de forcer l'Institution à se prononcer, espérant ainsi créer une interdiction globale de tout contenu sur les calculatrices dès la session 2016, sans avoir donc à attendre la session 2018.
On aurait pu espérer de l'Administration un abandon des poursuites mais visiblement non, plusieurs candidats ayant reçu une lettre recommandée sur le modèle ci-contre, annonçant une décision de la commission disciplinaire du Baccalauréat en septembre prochain. Des vacances d'été gâchées en perspective...
Notons donc le motif :
"usage d'une calculatrice contenant des éléments de cours non autorisés en mémoire".
En l'absence de texte réglementaire traitant du contenu des calculatrices, l'administration s'engage sur une voie périlleuse. En effet, qu'est-ce que des éléments de cours non autorisés ? Les applications de tableau périodique des éléments ou de formulaire de coniques chargées d'origine sur les TI-82/83/84 n'en seraient-elles pas elles aussi ?
Sur quels textes récents se basent donc certains centres d'examens pour expliquer leur changement de comportement cette année ? Certains ont accepté de nous répondre :
- D'une part, nous avons la nouvelle réglementation calculatrices applicable à compter de la session 2018. Même si les mesures qu'elle définit ne sont pas encore en vigueur, ces mesures sont introduites pour lutter contre la possibilité d'utiliser les mémoires des calculatrices comme "anti-sèches". De l'avis des personnels concernés, ce texte redéfinit donc depuis le 2 avril 2015 dernier cette pratique comme frauduleuse.
- D'autre part, nous avons les consignes de surveillance interdisant tout "appareil non autorisé permettant la consultation d'informations".
Certes, dans un article précédent nous décortiquions la formulation de cette phrase, et en déduisions qu'elle n'interdisait absolument pas la consultation d'informations sur calculatrice, aux épreuves où celle-ci était autorisée.
En effet, la phrase interdit d'une part les appareils permettant la consultation d'informations, pas la consultation d'informations en elle-même. Toute calculatrice programmable est un appareil permettant la consultation d'information, mais leur autorisation mentionnée en page de garde du sujet est prioritaire sur la consigne générale les interdisant.
Il semble en fait que certains centres d'examens aient une interprétation différente de cette phrase, car ayant une définition plus large du mot 'appareil', pouvant être selon eux non seulement un matériel mais également un logiciel. Dans cette interprétation, tout logiciel/application/programme permettant la consultation d'informations sur une calculatrice graphique est donc également interdit.
La bonne nouvelle, c'est que par la force des choses l'Institution va bientôt devoir se prononcer sur ces cas et donc interpréter et ainsi clarifier ses textes, nous donnant tort ou raison. Les candidats de la session 2016 sauront donc enfin tous à quoi s'en tenir, indépendamment de leur centre d'examens, et seront ainsi à nouveau tous à égalité !
Nous regrettons toutefois très fortement que cette clarification se fasse dans un contexte inégalitaire, au détriment d'une petite poignée de candidats attrapés pour l'exemple car ayant eu la malchance de composer dans le mauvais centre d'examens avec le mauvais surveillant et/ou d'avoir utilisé une calculatrice trop voyante comme la TI-Nspire CX CAS, et espérons en échange que les sanctions éventuelles sauront rester légères pour cette première année.
Si sanctions il doit y avoir en septembre, un avertissement sera dorénavant affiché sur les pages de nos convertisseurs de documents en ligne et possiblement pages de téléchargements, à destination du public francophone.